mardi 23 octobre 2012

Uemoa/Projet de budget 2013

Le Bénin avant dernier
En économie, la comparaison est le premier outil de reconnaissance des performances d’une entité. Nous sommes en octobre, mois retenu par les législations des pays de l’Uemoa pour lancer le processus d’adoption des budgets des Etats membres. Sur huit économies de l’Union, six ont déjà retenu les grandes tendances du budget de l’Etat exercice 2013. Au nombre des six, le Bénin occupe l’avant dernière place derrière deux pays sahéliens.
Ralf Zinsou
Au nombre des six pays de l’Union économique et monétaire ouest africaine (Uemoa) qui ont déjà finalisé leur projet de budget exercice 2013, le Bénin se place cinquième avec 1.044,494 milliards F Cfa, juste avant le Mali, 1.007 milliards F Cfa, un pays divisé en deux et en guerre. Juste avant lui, avec 1.279 milliards F Cfa, le Niger qui projette un taux de croissance avoisinant les 7% en 2013. Mieux que le Niger, le Burkina Faso se positionne à la troisième place avec 1.422 milliards F Cfa. Occupant sa position traditionnelle, le Sénégal arrive deuxième avec 2.453 milliards F Cfa derrière la Côte d’Ivoire en position de leader avec 3.814 milliards F Cfa. Les Togolais qui ont eu à dépenser en 2012, 644,462 milliards F Cfa sont en conférence budgétaire interminable. Quant à la Guinée Bissau, inutile de se creuser la tête à la suite du putsch dont le pays traine encore les séquelles.
Des chiffres qui parlent
Les participants à la table ronde secteur public-secteur privé la semaine prochaine au Bénin disposent ici d’éléments d’appréciation pour mieux appréhender l’économie Béninoise. En effet, si une comparaison de chiffre n’a pas grande signification en matière de budget, une lecture plus approfondie permet de faire parler les chiffres. Ainsi, lorsqu’on prend les pays les plus proches du Bénin en termes d’indicateurs économiques jusqu’à un passé récent, le Bénin passe derrière le Burkina Faso et aussi le Niger. Ces deux pays ont affiché respectivement au cours de l’année 2012 des taux de croissance de 7% 11,6% (statistiques de la Commission de l’Uemoa en juillet 2012) et des taux d’inflation de 4,5% et -0,2%. Si le Burkina Faso, avec ses 16.967.845 d’habitants et le Niger ses 17.078.839 d’âmes peuvent rassurer les Béninois qui, avec huit millions de têtes à nourrir, n’ont pas autant de contraintes, on est tout au moins en droit de se dire que tout ceci étant pourtant le budget du Bénin était plus important que les leurs. Car, le Togo, avec une population de 6.191.155 d’âmes a dépensé en 2012, 644,462 milliards F Cfa et son budget 2013 est annoncé pour connaître un bond quantitatif remarquable. Autrement dit, si la taille de la population est une donnée à prendre en compte, celle-ci n’est pas déterminant, voire absolue. Il existe en effet d’autres réalités à prendre en compte qui ne sont pas du tout favorables au Bénin. En effet, le Burkina Faso et le Niger sont deux pays sahéliens sans littoral. Pourtant, malgré la crise, ils révisent là leurs ambitions significativement à la hausse. Même si les dernières performances affichées par le Niger trouvent leurs explications dans les ressources minières (Uranium et le Pétrole) en pleine exploitation, le Burkina, à population quasiment dans le même ordre, ne bénéficie pas des mêmes avantages. En comparaison, les chiffres affichés par l’économie burkinabè minimisent les ressources minières du Niger. Sauf que le potentiel de croissance du Niger est impressionnant avec un taux d’inflation négatif vers la fin de l’année 2012, un record dans l’Uemoa.
Les atouts comparatifs pas suffisamment exploités
Si le Port de Cotonou est qualifié de poumon de l’économie béninoise, c’est justement parce qu’il y a ces pays qui sont contraints de l’emprunter. Au nombre de ceux-ci, il y naturellement le Burkina Faso et le Niger. Seulement, depuis quelque temps, ces pays s’offrent d’autres possibilités dans les ports d’autres pays du Golfe de Guinée. Ainsi, le Togo est l’un des bénéficiaires de ce détournement de trafic. La preuve, avec la baisse des activités au port de Cotonou, le Togo annonce un budget très ambitieux pour l’année 2013. Autant de réalités qui mettent en exergue la santé de l’économie béninoise en cette fin d’année 2012 dans une perspective de projection pour 2013.

jeudi 11 octobre 2012

Bénin/Gouvernement-Syndicat

La face cachée du budget 2013
Suite aux grognes qui se font persistantes depuis que le gouvernement a rendu publics les grands axes du projet de budget général de l’Etat exercice 2013, nous avons décidé de donner la parole aux acteurs sociaux afin qu’ils expriment, de vive voix, leurs points de vue. Le secrétaire général de Fédération des syndicats des travailleurs des finances, Laurent Metongnon nous a accordé l’interview dont la teneur suit.
A la lecture du contenu du projet de budget exercice 2013, rendu public par le gouvernement, quelles sont vos premières observations ?
Merci messieurs les journalistes, comme nous le savons tous, le 5 octobre 2012, le gouvernement a donné les grands axes du budget 2013. Beaucoup de chiffres ont été communiqués au public. Ce qu’on peut retenir, est que le projet de loi de finances pour la gestion 2013 est équilibré en ressources et en charges à la somme de 1.044, 494 milliards de francs Cfa. Le besoin de financement extérieur, c’est ça qui est important. En effet, en dehors de ce qu’on appelle ressources intérieures, qu’est ce qu’on doit pouvoir mobiliser à l’extérieur, le montant fait 248,434 milliards de francs Cfa. Il faut dire que ce besoin de financement chaque année est en augmentation et ce sera pareil pour 2013. Le communiqué précise que ce budget est établi dans un contexte de morosité de l’environnement économique et financier qui impose une discipline budgétaire et des contraintes financières aux Béninois. C’est ce que le gouvernement lui-même dit. On verra, à travers l’exercice, si les prescriptions du gouvernement lui-même, dans les différents compartiments, seront effectives. On s’est imposé une discipline budgétaire et des contraintes financières.
Le budget 2013 se veut volontariste et orienté vers le social, la relance économique, la lutte contre l’insécurité et la réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement (Omd). Là, c’est ce que le gouvernement a lui-même dit. Maintenant, examinons quelques aspects de ce communiqué pour savoir in fine le sort réservé à la satisfaction des revendications des travailleurs suite aux promesses faites par l’Exécutif à l’occasion et à la suite des dernières négociations avec les organisations syndicales, celles des enseignants en particulier et de façon générale ; les mesures pour la lutte contre la pauvreté au Bénin, puis que c’est de ça qu’il s’agit.
Alors, quelles sont vos observations par rapport aux ambitions affichées dans le document ?
Dans un premier temps, nous allons voir le caractère volontariste du budget. Est-ce qu’un budget doit être déclaré volontariste ? Il s’agit, de mon point de vue, d’un non sens. Car, l’élaboration d’un budget tient  compte de l’évolution de la conjoncture internationale, régionale et nationale. On ne décrète pas un taux de croissance parce qu’on veut qu’il en soit ainsi, pour qu’il le soit au finish. Le taux de croissance de 4,5 % projeté contre 4,1 % initialement attendu pour 2012, mais révisé à 3,5 % devrait servir de leçon pour observer une prudence et parler plutôt de réalisme dans l’élaboration d’un budget et non de volontarisme. Mieux, basé le taux de croissance de 4,5% projeté pour 2013 au regard des bonnes perspectives dit-on de la seule production cotonnière, dans les conditions que l’on sait, avec un environnement non maîtrisé, parait de la prestidigitation et non de l’analyse macroéconomique. Pis, imposé à un tout un peuple la seule culture du coton sans une tentative de maîtrise des risques pathologiques, écologiques, environnementales et économiques à court moyen et long terme est aussi, de mon point de vue, une dictature. Car, la liberté de produire est également un droit fondamental de l’homme. Nos paysans devraient être libres de produire selon nos besoins et selon les marchés et ils devraient tous être accompagnés par l’Etat. Même ceux qui produisent du maïs, de l’arachide, du haricot, c'est-à-dire tout ce qui est produit vivrier, devraient être accompagnés de la même façon que l’on accompagne les producteurs du coton. Surtout que, une enquête précédemment effectuée dans notre pays a prouvé que, quand vous prenez un paysan qui produit un hectare de coton, il en sort endetté. Or, lorsque, vous prenez un paysan qui fait un hectare de maïs ou, de l’arachide, il en sort bénéficiaire.
Sur un second plan, je vais me permettre de faire un bref aperçu des prévisions de recettes et de dépenses parce que, j’estime que c’est à partir des données des budgets des années n-1 et n que l’on doit pouvoir savoir comment projeter le budget de l’année n+1. Pour vérifier le réalisme du budget gestion 2013, regardons un peu les prévisions et les réalisations des années 2010, 2011 et 2012. Je note que les prévisions de recettes annuelles en 2010 étaient de 1.346,44 milliards. En 2011 elles étaient fixées à 1.099,37 milliards pour revenir en 2012 à 1.016,6 milliards. et qu’en 2013 on passe encore à 1044,494 milliards. Dans un contexte plus difficile avec les crises économique et financière internationales, avec au plan mondial toutes les incertitudes, du fait des difficultés que connaît l’euro aujourd’hui, sans oublier les Etats-Unis en récession et sur le point d’organiser une élection, tous s’accordent à reconnaître qu’il y a plus de points d’ombre à l’horizon, notamment pour nous, pays sous-développés. Maintenant quand on prend les réalisations annuelles, elles se présentent comme suit : en 2010, les réalisations ont été de 1.019,54 milliards pour des prévisions que j’avais données tantôt de 1.346,44. En 2011 les réalisations annuelles se chiffraient à 843,96 milliards pour des prévisions de 1.099,37 milliards. En 2012 puisqu’on est encore en plein exercice, au 30 juin, les réalisations se chiffrent à 461,9 milliards pour des prévisions de 1.016,6 milliards. Or nous sommes en octobre. Vous voyez au niveau des régies surtout lorsqu’on prend la douane, pour ce qu’on appelle la fiscalité de porte. Ça veut dire que la douane, la marchandise est là et il faut payer avant que cela ne sorte. Or, tout le monde est unanime aujourd’hui pour dire que notre port n’attire plus. Donc avec les difficultés actuelles où les réformes au port battent de l’aile, la pauvreté ambiante, et là il faut aller à Dantokpa pour savoir ça, on n’est pas sûr qu’à la fin de l’année 2012, les réalisations dépassent celles de l’année précédente. Alors, fallait-il se baser sur cette réalité ou sur une hypothétique récolte du coton, moi je pense que, aux lecteurs eux-mêmes de tirer les leçons. Je pense que j’ai été suffisamment  clair sans rentrer dans les détails et dans le fonds. Et, lorsque dans un pays on a des macros économistes au pouvoir, on devrait quand même tirer toutes les conséquences avant de projeter l’avenir.
Mais là vous faites impasse sur les bonnes intentions du gouvernement…
Là, vous voulez parler des mesures annoncées à la télé. Nous avons tous suivis la kyrielle de milliards qui pourraient donner le tournis à certaines personnes. Mais au fonds, qu’est ce qu’on peut retenir ? Moi je pense que les milliards qui ont été évoqués dans ce budget ou les mesures qui ont été annoncées paraissent plus politiques que sociales. Quand bien même je reconnais que le budget c’est l’expression chiffrée de la politique d’un gouvernement pendant une année. Ce que j’appelle politique ici, se constate à travers les projets qui ont été listés et auxquels on attribue des milliards de francs Cfa. Dans un premier temps, moi je me suis dit que dans ce budget, la première mesure qui devrait attirer l’attention de tout citoyen dans ce pays, c’est d’abord de réduire le train de vie de l’Etat. Vous voyez, nous avons 26 ministères, et il y a des ministères en faite qui n’étaient  que des directions techniques de certains autres ministères au départ. Il y en a pleins. Moi je me disais que, avec la situation économique que nous vivons, l’on devrait réduire le gouvernement à au plus 15 membres.
Quelles sont les ministères qui doivent disparaitre selon vous ?
Pas qu’ils doivent disparaitre. Ces ministères étaient des directions techniques. Vous prenez par exemple le département de la microfinance, c’était au ministère des finances et de l’économie. Celui de la réforme administrative et institutionnelle, c’était à la fonction publique, l’économie maritime, mais c’était dans le portefeuille des travaux publics et des transports. Il y en a d’autres qui n’existaient pas, mais les directions techniques qui s’en occupaient donnaient même plus de résultats que ce à quoi nous assistons aujourd’hui. Je veux dire qu’actuellement, avec ce qui se passe, les gros lots ont été déjà distribués, que ce soit les lots intermédiaires ou même les lots de consolations, on continue d’en donner. Mais dans l’élaboration de ce budget 2013, je m’attendais à ce qu’on dise, nous avons suffisamment déjà donné de gros lots à des gens parce que les ministères, moi j’appelle ça des gros lots. Les directeurs qui ont été nommés, les directeurs techniques etc. moi j’appelle ça des lots intermédiaires. C’est une façon de remercier. Ne nous voilons pas la face, c’est de ça qu’il s’agit. Parce que, un ministère créé, tout ce que cela donne comme dépenses, c’est important. On aurait gagné beaucoup en ayant cette vision qui consiste à réduire autant que possible les charges compressibles. Mais si on veut récompenser, parce que c’est ça qu’il faut en politique, parce que la politique au Bénin, on y va pour s’enrichir, nous constatons. Et c’est cela l’esprit qu’on a inculqué à la jeunesse d’aujourd’hui. Une nouvelles donne qui prend sa source dès 1990. Avant, les choses ne se passaient pas comme ça. Mais à partir de 1990, où on a apprit à la jeunesse à avoir le gain facile, on a projeté les jeunes dans la politique parce que, il faut aller faire campagne, il faut prendre des sous, on a souillé la jeunesse. Or, les pays riches, les pays développés, ceux vers qui nous allons chercher le financement extérieur, ils n’ont pas autant de ministères, ni pour se développer, ni pour consolider leurs acquis. Alors, pourquoi nous qui devons équilibrer notre budget, qui devons tendre la main pour combler nos déficits avons besoin de tant de ministères ?
Mais vous n’appréciez toujours pas la moindre mesure au titre de celles qui sont annoncées…
Ce qui m’intéresse comme mesure sociale, c’est par exemple au niveau de la santé. Lorsque vous prenez la santé, la dotation budgétaire inscrite a par exemple diminué de 30,16 % par rapport à 2012. C’est à croire que les Béninois se portent mieux et qu’en 2013 ils se porteront davantage bien. Si le budget de la santé diminue, alors que, on demande aux gens d’aller cultiver le coton partout, même dans les zones où on ne doit pas cultiver le coton, allez-y voir. Moi je ne suis pas chercheur, mais les chercheurs de notre pays, les gros chercheurs de l’université, ont toujours dit par exemple que l’Atacora, où il y a le bassin, le château d’eau du Bénin, ce n’est pas une zone où on doit cultiver le coton. Parce que tout ce qui est utilisé comme pesticides (engrais, insecticides, herbicides) à long terme, ce n’est pas bien pour l’homme. Or, si lorsqu’on utilise les terres de la région connue comme étant le bassin, le château d’eau du Bénin, ça veut dire que l’eau qui sera drainée jusqu’au Sud du pays n’est pas saine. Elle est porteuse de maladies en aval. On ne  le voit pas aujourd’hui, mais demain, on ne sait pas ce qui va en sortir. Mais dans les pays où cela se fait, on ne cultive pas le coton partout, il y a des zones interdites. Je pense qu’il faut aller chercher au niveau de nos universités les travaux de recherche à cet effet. Les recherches ont été faites dans notre pays et ont abouti à des conclusions qu’il y a des zones où on ne doit pas cultiver le coton. Or aujourd’hui, on demande de le faire partout sans tenir compte de l’environnement, de tout ce qu’il y aura comme problèmes au plan même économique.
Par rapport aux réductions, lorsqu’on prend le domaine de l’agriculture de l’élevage et de la pêche la dotation ne passe que de 25,520 milliards F Cfa en 2012 à 26,031 milliards en 2013. Vous voyez que  c’est maigre. Ça fait peut être à peine 2% d’augmentation pour l’agriculture, l’élevage et la pêche alors qu’on parle de relance du secteur agricole.
En ce qui concerne les engagements pris au plan international, soit au moins 10% du budget des Etat à l’agriculture, le Bénin tien parole. Non ?
C’est vrai. Au niveau de la norme internationale, on a fixé 10%. A 11%, on respect les exigences internationales. Ce taux est investi dans quels domaines ? Ça fait longtemps qu’on parle de la mécanisation de l’agriculture. Combien de terres sont mécanisées dans notre pays ? Les machines sont où ? Et se donnent à qui et comment ? Est-ce qu’on a même les pièces de rechange de ces machines là ? Il ne suffit pas simplement de dire qu’on a mécanisé pour que cela soit fait.
Dans le même temps où dans ce pays l’on parle de reboisement de terre, les gens continuent de couper les bois pour aller ensabler le lac Ahémé au vu et au su du gouvernement. Pendant les campagnes électorales on va dire aux paysans qu’on va draguer le lac. Dans le même temps, la loi qui interdit d’aller déboiser les terres, la loi qui interdit d’utiliser les engins prohibés dans le lac Ahémé existent mais personne ne veut les respecter. Allez voir dans le lac Ahémé.
C’est la faute à qui ?
C’est la faute d’abord au gouvernement. Puisqu’une loi interdit d’aller couper les arbres et on nous demande d’emplanter. Le Président était à Rio+20 la dernière fois. Le réchauffement climatique. Il a même pris des engagements mais dans sont pays aujourd’hui, c’est la forêt qui est dévastée. Les ramilles pour aller ensabler le lac Ahémé.
Passons à une autre mesure contenue dans le budget.
Lorsqu’on passe à l’éducation, tenez vous bien tranquille, la dotation passe de 59,991 milliards F Cfa en 2012 à 22,180 F Cfa en 2013. Doit-on fait de l’économie dans l’éducation ? Alors que lorsque la rentrée à commencé, le chef de l’Etat a dit de retourner tout enfant de 16 ans airant dans les rues, à l’école comme on le faisant auparavant dans les couvents. Mais voila la dotation pour accompagner l’éducation.
Dans les autres domaines, miniers, industriels et commerce, il n’y a même pas de dotation. Pareil pour la décentralisation, l’artisanat et le tourisme. Le gouvernement n’a pas prévu un copeck au titre de dotation. Par contre, lorsque vous prenez la justice, la dotation passe de 1,635 milliards F Cfa en 2012 à 5,803 milliards de francs Cfa en 2013. Une augmentation très substantielle. Est-ce à dire que le citoyen de demain aura droit à une bonne justice ? Est-ce que les fonds vont servir à rendre nos magistrats plus indépendants ? Est-ce les fonds seront utilisés pour que les dossiers ne trainent plus à la justice ? Ou bien, on veut les utiliser dans des projets de construction, dans des projets d’appui ou encore dans des projets qui ont les mêmes noms. La question reste posée.
La dotation au niveau de la sécurité et la défense, elles passent de 3,164 milliards F Cfa en 2012 à 6,886 milliards F Cfa en 2013. Je sur d’accord si c’est pour que nos militaires, nos policiers et autres forces de défenses et de sécurités soient mieux payés, soient mieux équipés pour ne pas être aux garde-à-vous devant les braqueurs. Mais si c’est pour aller construire, si c’est pour aller faire ce qui n’influence pas directement la sécurité publique, franchement ce sera regrettable pour cette loi de finance. Encore que ce sont eux-mêmes qui parle de « mesures économiques, mesures sociales, mesures ci, mesure ça ». Ce n’est pas pour payer les salaires, il s’agit des dotations au niveau des Programmes d’investissement public (Pip). Ces mesures dites de développement économique et social sont des projets dont les titres sont vagues et se répètent chaque année et méritent bien une dizaine d’interrogations. Quand vous prenez le budget, vous voyez des titres « appui à ceci », « appui à cela ». Il y a un titre par exemple, on dit que désormais ont veut fait « appui à l’Administration de développement ». Ça veut dire quoi « appui à l’administration de développement » ? Ce titre se retrouve dans plusieurs ministères. Une Administration de développement où on ne sait même pas comment les gens y sont recrutés. Une Administration où ce n’est pas les jeunes qui sont percutant qui occupent ses postes. C’est une Administration basée essentiellement sur la politique, la région, l’ethnie, la religion. Même ceux qui sont venus évalués notre Administration dans le cadre du « Mécanisme africain d’évaluation par les paires » on dit dans le document qu’elle est trop politisée. Et on veut accorder des crédits à des ministères soit disant pour promouvoir une Administration de développement. Je ne sais même pas d’où est-ce qu’on sort cette appellation.
Parlons des revendications des travailleurs que vous êtes. Trouvez-vous gain de cause dans le projet de budget exercice 2013 ?
Quand on en revient aux revendications des travailleurs. Dans le budget, c’est rare qu’on mette les dispositions d’accompagnement ou même les mesures prises par le gouvernement pour satisfaire les revendications des travailleurs. C’était au début du renouveau démocratique, sous le régime du président Nicéphore Dieudonné Soglo, qu’on a prévu tel montant qui équivaut à tel crédit pour la satisfaction des revendications des travailleurs. Mais dans les budgets du « Changement et de la Refondation », on a jamais vu ça. C’est quand les travailleurs commencent par faire la grève que le gouvernement voit au niveau des chapitres « non inscrits » un fonds ou un crédit et satisfait vaille que vaille leurs besoins. Puisqu’ils sont les seuls à inscrire des chapitres, ils doivent savoir où puiser pour calmer les tensions. Mais cela ne fait pas sérieux. Car, il nous faut des actions pérennes. Ils savent où ils ont logé les crédits au niveau des charges non réparties. Peut-être qu’au niveau du ministère de l’économie et des finances, au niveau des charges non réparties, des crédits ont été peut-être logés là. Et il faut attendre les travailleurs entrer en grève pour qu’on se résous à aller trouver ces crédits là pour les satisfaire. Rien dans ce budget n’a été prévu pour les revendications des travailleurs.
Au niveau des syndicats, ce qui devrait se faire, c’est que lorsque que le budget se prépare, il faut être là en mouvement pour y introduire les points indiciaires. Les syndicats n’ont pas été associés à l’élaboration du budget, c’est l’Etat qui en a décidé ainsi. Les syndicats, notamment les responsables des centrales, ne seront associés que lorsque le Parlement est en examen du budget : c’est trop tard. Parce que, lorsque les députés examinent le budget, ils peuvent ne pas augmenter les dépenses sans chercher les ressources correspondantes. Or, lorsque vous prenez le budget de 2013, il y a certains impôts qui ont été créés. Si eux devra encore en ajouter, à aller chercher dans la poche des citoyens qui aujourd’hui vivotent, ce serait encore plus dangereux pour eux entant que représentants du peuple. Donc les négociations, en principe, avec les centrales syndicales, les fédérations, devraient se faire en amont. C'est-à-dire au moment où on prépare le budget. Il faudrait déjà s’entendre pour dire, avec la conjoncture internationale régionale et nationale nous ne pouvons plus faire ceci. Il faut que le gouvernement mette les informations à notre disposition afin que nous puissions participer ensemble aux mesures à prendre. Vous voyez les recettes attendues pour 2013, attention voila le niveau auquel nous sommes. Nous ne sommes même pas sûrs de la doublée en fin d’année. On ne peut partager que ce qu’on a. Voila ce que nous avons chers travailleurs. Qu’est-ce qu’il faut faire ?
Est-ce à dire que vous annoncez déjà une tension au cours de l’année budgétaire 2013 ?
En tout cas, pour nous, au ministère des finances, à la lecture de ce budget, ce qui nous intéresse d’abord c’est la pauvreté. Comment ils veulent régler la question ? Le gouvernement se doit de satisfaire les travailleurs qui on fait des grèves, à qui on a fait des promesses.
Dans le budget, on a parlé de la dette extérieure mais la dette intérieure elle est aussi importante. Nous constatons que dans ce budget, le gouvernement s’intéresse à d’autres dettes et oublie les prestataires nationaux à qui il doit des millions, voire des milliards si on en fait la somme. Aucune trace de la politique de remboursement de cette dette là ne figure dans le projet de loi envoyé à l’Assemblée nationale. C’est sûr qu’au niveau des charges non répartie ils ont prévu certainement des mesures. Mais je m’attendais à voir le niveau de la dette intérieur dans le budget. Nous, au niveau de la Fesyntra-Finances, on avait donné un chiffre. Mais je ne sais pas si entre temps, le gouvernement a épongé une partie ou s’il en a eu de plus. Nous avons publié environ 19 milliards de francs Cfa. C’est d’ailleurs le lieu pour les prestataires de services de monter au créneau pour réclamer justice. Cette dette n’est pas négligeable. Nous pensons que si cette dette est apurée, cela sera d’un grand effort à l’économie parce que ce sont des entreprises béninoises, c’est des Béninois qui ont rendu service à l’Etat mais contre toute attente, n’ont pas été payés. S’ils étaient payés à temps, une bonne partie de cette ressource financière sera déjà réinjectée dans l’économie nationale. C’est aussi les recettes de l’Etat qui en sortiraient gagnantes. Dans le budget, la politique d’apurement de cette dette n’apparait pas clairement. Telle que la dette extérieure a été spécifiée, celle intérieur ne l’est pas.
Comment voyez-vous l’initiative du gouvernement à vouloir associer l’économie informelle à la recette public ?
Je trouve que c’est une bonne politique que de vouloir associer aux recettes du trésor le secteur informel. Car, au Bénin il représente 80% de l’activité économique. Ceux qui échappent à l’impôt créent l’évasion fiscale. Mais à y voir de prêt, ce n’est pas des petits qui alimentent ce secteur, ce sont de gros. Ils maîtrisent bien les rouages administratifs. Car, ils ont les leurs dans cette Administration.
A qui faites-vous allusion ?
Les « kpayo » qui rentrent au Bénin, vous pensez que s’ils n’avaient pas des parrains au sein de l’Administration, ils pourront exercer en toute liberté et en toute tranquillité ? Et cela allait durer tout ce temps là ? En fait, ce sont les honnêtes gens qui sont à Dantokpa et autres qui ont installé leurs enseignes qui payent. Tout le reste, c’est dans l’informel. Au Bénin, les citoyens ne sont pas égaux devant l’impôt. C’est l’injustice au niveau de l’impôt. Je vous remercie.
Ralf Zinsou

Bénin- budget 2013

Les grands axes de la loi de finances
(Revendications syndicales en sursis)
(Une Agence des grands travaux)
(Forum économique toujours sur table)
(Les mesures d’austérité reviennent)
(Dépenses de fonctionnement rationnées)
(1.044 milliards F Cfa)
(4,5% de prévision de croissance)
(26,7% aux investissements)
(11,7% à l’agriculture)
(44,1% aux secteurs sociaux)
(22% aux infrastructures)
Le gouvernement du Bénin vient de finaliser le projet de loi de finances exercice 2013. Ce budget, d’un montant total de 1.044 milliards de franc Cfa est en accroissement de 2,75% par rapport à 2012. En attendant son examen au Parlement, en vue de son adoption, nous livrons ici les grands axes des ambitions du régime Boni Yayi pour la République du Bénin en 2013.
Aubin R. Towanou
Etant données les contreperformances financières du Bénin en 2012, nous aurions souhaité un collectif budgétaire avant l’adoption du budget général de l’Etat gestion 2013. Mais puisqu’il faut avancer, le gouvernement du Bénin vient de prendre de nouvelles options pour conduire la destiné des Béninois qui vivent une situation économiquement délicate en ce dernier trimestre 2012. Nous aurions voulu publier un tableau récapitulatif relatif au budget, mais sans un environnement secret inutile entourant les documents publics, nous nous contentons ici des chiffres récoltés çà et là, notamment sur une émission télévisée qui recevait les deux ministres concernés sur la chaîne de télévision de l’Ortb.
1.044 milliards F Cfa pour 4,5% de croissance
Avec une ambition de 1.044 milliards de francs Cfa, le gouvernement du Bénin escompte atteindre un taux de croissance de 4,5% en 2013. Et pour en arriver là, l’Exécutif béninois ne s’est autorisé qu’un déficit de 248 milliards de francs Cfa, soit 3,4% du Produit intérieur brut (Pib). Un déficit en net régression par rapport à l’exercice finissant avec 3,6% du Pib, lui-même en régression par rapport à 2011, avec 4,1% du Pib. 4,5% comme prévision de taux de croissance dans les conditions actuelles est un exploit, étant données les contreperformances économiques de ces derniers mois. Mais le ministre de l’économie et des finances, Jonas Gbian, y croit fermement en comptant sur une récolte cotonnière attendue de 400 mille tonnes de coton graine dans le cadre de la campagne en cours. En plus de cette relative embellie cotonnière, le calibrage du budget 2013 prend en compte d’importants investissements dits productifs qui autorisent une projection de 4,5% de taux de croissance soutient le ministre de développement, de l’analyse économique et de la prospective, Marcel Alain de Souza.
D’importants investissements
Le budget 2013 prévoit une part importante aux investissements, soit 26,7%. Et pour doper véritablement l’économie, suivant les thèmes utilisés par les ministres sectoriels, 22% du budget seront consacrés aux infrastructures. Pour mieux coordonner ces lourds investissements, l’Exécutif béninois prévoit la création d’une « Agence des grands travaux ». Sur la liste des travaux envisagés, le nombre des réalisations au programme donne la preuve d’une ambition à la limite de l’audace. L’aéroport de Glo Djigbé qui sera réalisé en BOT (Built opérate and transfert), ne souffrira d’aucun soutien de la part du gouvernement. L’achèvement de l’aéroport de Tourou à Parakou est en bonne place. Des investissements sont prévus dans le secteur de l’énergie pour accroître les capacités énergétiques du Bénin. On évoque le barrage d’Adjalala. Les infrastructures routières bénéficient toujours d’une attention particulière de la part du gouvernement qui prévoit ouvrir plusieurs axes routiers reliant le Nord Bénin au Nigeria. L’objectif poursuivi ici est de booster les échanges entre les deux pays en vue d’améliorer les recettes douanières aux frontières avec le grand voisin de l’Est. Le démarrage des travaux de construction du Port en eau profonde de Sèmè-Kpodji est aussi à l’ordre du jour. Les rails ne sont pas oubliés. A cet effet, le Bénin veut prendre une part active dans le projet de construction de 2.900 Km de rails reliant le Bénin à la Côte d’Ivoire passant pas le Niger et le Burkina Faso.
Forum économique
Conscient du fait que le projet de budget exercice 2013 n’est pas suffisamment un budget favorable au secteur privé, l’organisation d’un forum économique reste à l’ordre du jour. Ainsi, le régime Boni Yayi entend réunir les producteurs de la richesse nationale au premier chef afin d’examiner avec eux les conditions à créer pour favoriser la prospérité de leurs affaires tout en garantissant les intérêts du trésor béninois, garant de l’intérêt général. Ce projet, évoqué pour une première fois par le chef de l’Etat le 1er août 2012 à l’occasion d’une interview, est donc toujours en préparation au grand bonheur des opérateurs économiques béninois. Ces derniers ayant de nombreux points de divergence avec l’Administration, notamment celle fiscale, qu’ils souhaitent bien soumettre à débat à cette occasion.
Encore des réformes
De nombreuses réformes sont envisagées dans le cadre de la loi de finances gestion 2013. La plus en vue est celle relative au secteur agricole où les réformes interviendront à plusieurs niveaux. Le retour de la gestion de la filière coton dans le girond de l’Etat avec l’introduction du zonage est la réforme la plus attendue étant donnée la relative performance de la campagne en cours. D’un autre côté, afin de mieux réorienter la mécanisation agricole, une « Agence de développement de la mécanisation est envisagée pour se substituer au Programme plurisectoriel de mécanisation agricole (Ppma). Au niveau des vallées du Bénin, un projet sera initié pour capitaliser et réformer toutes les initiatives de valorisation des vallées en cours actuellement. Au Total, le secteur agricole recevra 11,7% du budget total, soit un taux supérieur à 10%, engagement pris par le Bénin vis-à-vis de la communauté internationale. Par ailleurs, la réforme foncière préoccupe le gouvernement dans le cadre du projet de budget exercice 2013. Ainsi, le projet de Code foncier sur la table du Parlement verra le processus de son adoption s’accélérer. Les deux nouveaux quais à containers construits dans le cadre du financement de Mca seront mis en service. Aussi, la réforme relative au Programme de vérification des investissements de nouvelle génération sera ressuscitée en 2013.  

Secteurs sociaux mais sans philanthropie
Le gouvernement, dans le cadre du budget 2013 a pris l’option de faire du social dans un contexte bien encadré. Les ménages peuvent se réjouir d’acheter en 2013 le gaz domestique à prix réduit. L’Etat s’abstiendra d’y prélever de la taxe sur la valeur ajoutée (Tva). Même mesure pour ce qui concerne les loyers dans le cadre des habitations. L’achat des casques pour se protéger sur les axes routiers béninois encore très fréquentés par les motocyclistes sera exonéré de Tva. Le régime d’assurance maladie universelle, lancé en 2012 sera une réalité tangible en 2013 avec un soutien financier efficient de la part du gouvernement. Aussi, les secteurs sociaux (éducation, santé,…), où les agents de l’Etat sont plus nombreux, bénéficieront de 44,1% du budget. Il s’agit de prendre de bonnes options sur le chemin de l’atteinte des objectifs du millénaire pour le développement (Omd). Cependant, cet effort budgétaire accordera une place de choix aux investissements accélérateurs de croissance économique au niveau de ces secteurs. Avec l’accroissement substantiel d’efforts en faveur du social, le gouvernement s’impose de tenir grand compte des engagements de l’Etat béninois dans toute amélioration du revenu salarial des fonctionnaires.
L’austérité au rendez-vous
En plus du fait qu’on peut quasiment soupçonner que le gouvernement est dans une logique de refus de la prise en compte des revendications syndicales qui entraîneraient une hausse de la masse salariale, d’autres surprises attendent les agents de l’Etat. A partir du budget 2013, le trésor public ne prendra plus en charge, hors budget sectoriel, les dépenses de consommation d’eau, d’électricité et de téléphone des administrations publiques, notamment celles des ministères. Ainsi des options claires sont prises pour baisser sensiblement les dépenses de fonctionnement de l’Administration publique. Une mesure à laquelle le chef de l’Etat attachera du prix, a indiqué les ministres qui défendaient le projet de budget lors de l’interview qu’ils accordaient à la chaine de télévision de l’Ortb le samedi dernier. Les mesures d’austérité prendront aussi en compte la politique de l’Etat en matière de dotation de véhicule administratif. Ici, si les options ne sont pas précises, il faut retenir qu’il ne sera pas exclu qu’en 2013, des cadres ayant droit constatent la non disponibilité des véhicules mais la mise à disposition de dotation en carburant. Il leur sera recommandé d’acquérir eux-mêmes leur moyen roulant. En somme un budget d’austérité qui prend quand-même des options efficientes pour doper la croissance.

jeudi 4 octobre 2012

Bénin/Vie des formations politiques

Quand la trésorerie tue les partis
Considérés comme étant des clubs électoraux, les partis politiques au Bénin ont besoin d’être réformés en ce qui concerne la gestion de leur finance. Car, au-delà de toute conviction politique, l’argent prend une part importante dans le destin des formations politiques béninoises. Ils n’ont d’avenir qu’au gré de la bourse de leur principal bailleur de fonds ou de sa position à la tête d’une structure étatique pourvoyeuse, licitement ou non, de ressources financières.
Ralphe Zinsou
Au bout de cinq ans de gouvernance sous le régime Boni Yayi, le nombre de partis politiques qui comptaient jadis sur l’échiquier national et qui ne pèsent plus rien est longue. Le Parti du renouveau démocratique (Prd), la Renaissance du Bénin (Rb), le Parti social démocrate (Psd), le Mouvement africain pour la démocratie et le progrès (Madep), Force clé, l’Union pour la République (Upr), etc. sont autant de partis qui comptaient un nombre représentatif de députés à l’Assemblée nationale, de conseillers élus aux conseils communaux et municipaux, voire des maires. Aujourd’hui, ils sont réduits à leur plus simple expression. Le dernier exemple en date est le Prd qui est en passe de perdre le privilège d’avoir son propre groupe parlementaire à l’Assemblée nationale. La raison de cette débâcle reste la même. Quand la trésorerie va, les partis ont le vent en poupe, mais lorsque la finance est grippée, tout bascule dans la désolation.
Créés dans l’abondance, ils disparaissent…
Le Parti du renouveau démocratique (Prd), au-delà des convictions politiques de Me Adrien Houngbédji, avait pour objectif, non écrit, de le porter au pouvoir suprême au Bénin. Ainsi, au lieu de fonctionner sur le plan financier comme une institution impersonnelle, le Prd avait pour trésorerie la bourse de Me Adrien Houngbédji. Il devait tout financer même si parfois, des personnes proches de lui et disposant de moyens conséquents, devraient aussi mettre la main à la poche. Ainsi, lorsque le Prd a eu le privilège de 2006 à 2008 de participer à l’action gouvernementale, sous le régime de Mathieu Kérékou, des ressources pouvaient provenir de plusieurs sources autres que celles se rapportant au seul Adrien Hougbédji. De 2008 à 2011, en dehors de quelques préposés à être inscrits sur des listes électorales, de certaines bonnes volontés et autres députés élus, la cagnotte est désespérément remplie par le seul et unique bailleurs, Me Houngbédji. Lui-même l’a clairement affirmé dans une émission télévisée où il parlait même du financement solitaire de l’alliance « Union fait la nation ». Aujourd’hui hors jeu pour ce qui concerne la magistrature suprême, il est clair qu’il ne mette plus la main à la poche comme par le passé et du coup, c’est la descente aux enfers. Et sans un éventuel sursaut d’orgueil de sa part, le parti mourra de sa plus belle mort comme d’autres avant lui. Ainsi, le Prd donne un exemple typique de comment, avec une trésorerie male cadrée, les partis meurent au Bénin sans tambour ni trompète. Ceci après avoir connu des années de gloire au rythme d’espèces sonnantes et trébuchantes.
A quelques nuances près, la Renaissance du Bénin, formation politique créée à la tête de l’Etat lorsque son leader charismatique briguait la magistrature suprême, connaît le même sort. Lorsque ce parti avait tous les postes de l’Administration publique à sa portée, sans avoir le moindre programme identifiable et soutenable, il a compté jusqu’à 35 députés au Parlement. Il s’agit, à peu de chose près, de la situation actuelle des « Force cauri pour un Bénin émergeant » (Fcbe), formation politique de l’actuel président de la République. Depuis que la Rb a perdu le pouvoir, principal pourvoyeur de ressources pour ce parti, la descente aux enfers a commencé et s’est poursuivi dans le temps. Même si le parti est arrivé, lors des dernières municipales à Cotonou, à prendre la tête de la mairie, parce que vengé par les Cotonois, plus rien n’est sûr à l’horizon 2013. Et le nombre de députés répondant de cette formation politique au Parlement est édifiant.
Si Bruno Amoussou n’a pas créé son Psd à la tête du pouvoir, il l’a fortement financé et promu grâce à la position privilégiée qu’il a occupé dans le régime Kérékou. Après, et étant déclaré forclos à la présidentielle, la descente aux enfers est en pleine marche. Ce dernier n’a connu que le parcourt d’un certain Albert Tévoédjrè, même si celui-ci gère autrement sa chute. Lazard Séhouéto qui a créé son parti « au pouvoir », préfère aujourd’hui qu’on parle de l’Union fait la nation plus que tout autre chose. Idem au Madep fortement financé au départ par l’homme d’affaires Séfou Fagbohoun qui était, au départ, un privilégié du régime Mathieu Kérékou. On imagine d’ores et déjà le sort de « Fcbe » après 2016, dans le meilleur des cas.

Quelle trésorerie pour quel parti ?
Au Bénin, l’histoire du renouveau démocratique nous renseigne que si un parti politique n’est pas créé par un homme ayant des ambitions politiques personnelles immédiates liées à une échéance électorale, il est créé par un homme déjà au pouvoir qui veut en faire une machine de gestion de pouvoir. Ainsi, la trésorerie des partis politiques est souvent confondue à celle de leur initiateur. La liste des militants adhérents n’intéresse personne, encore moins leur cotisation pour consolider la finance du parti. La formation politique ne dispose généralement pas de comptabilité ni de comptable. A l’occasion des rendez-vous importants (élections nationales, élections à la tête d’une institution, nominations,…) à qui mieux-mieux, on met la main à la poche et non à la caisse, pour répondre aux besoins de financement qui s’imposent. Au finish, personne ne peut évaluer les dépenses du parti et ceci arrange tout le monde tant que le combat a un sens. Mais une fois forclos, étant données les limitations constitutionnelles, le chef de parti, ici promoteur politique, regrette ses dépenses folles qui avaient pourtant un but pour lui en son temps. A partir de là, l’hémorragie des militants s’aggrave et tout fini par une descente aux enfers. Et lorsque la formation politique ne trouve par un repreneur ayant du cran, elle sombre et disparaît de l’échiquier politique national comme elle a été créée.
Quel financement pour la pérennité ?
Ailleurs où l’expérience démocratique mérite d’être copiée, les partis politiques sont financés prioritairement par les cotisations des militants, les apports des mécènes. Aussi, pour ce qui concerne des ressources importantes, les formations politiques étant considérées comme des groupes de pression, des lobbys ont une formule simple. Ainsi, lorsqu’elles arrivent à position des cadres militants ou non à des postes de responsabilité, (élus ou nommés), procurant des avantages, ceux-ci financent la trésorerie du parti en guise de reconnaissance. On peut évoquer ici les emplois fictifs de Chirac en tant que maire de Paris. Pour tirer le plus de profit des nominations, les responsables politiques à la tête des Etats vont pousser le bouchon aussi loin que possible. En dehors des salaires mirobolants accordés, des primes impossibles ont été créées comme les stock-options ainsi que les parapluies dorés auxquels on attribue des critères de rentabilité, de performance. Nous n’allons pas occulter les affaires « Elf » et « Clearstream » en France pour évoquer le financement occulte des partis politiques en Occident. Cependant, il importe de souligner que les formations politiques que nous évoquons ici sont créées en dehors et au-delà des personnes mais attachées à une idéologie politique et se dotent régulièrement de programmes de gouvernement adaptés aux réalités du présent. Notons tout de même que l’exemple français est loin d’être considéré comme l’idéal en politique. Les pays scandinaves donnent de belles leçons de gestion transparente et orthodoxe de parti politique qui peuvent inspirer les Béninois. C’est peut-être la condition pour sortir de la médiocrité actuelle qui se résume en une seule phrase. Seules les formations politiques au pouvoir ou composant avec le pouvoir, dans une certaine mesure, peuvent connaître une promotion politique lorsqu’elles ne sont pas créées par un richissime personnage.



mercredi 19 septembre 2012

Bénin/Pot-de-vin

Les risques pour l’économie
L’économie béninoise est à la croisée des chemins. Sa santé est délicate quelque soit la rigueur du diagnostique. Si on doit évaluer son taux de croissance sur la période allant de février à août 2012, l’unité sera supérieur à sa valeur. C’est dans un tel contexte qu’une affaire de pot-de-vin vient ébranler l’entourage immédiat du chef de l’Etat. Il s’agit d’un dossier dans lequel, le Bénin, qui attend vainement les investissements directs étrangers pour doper sa croissance, joue très gros. Une réalité que le débat entretenu autour du sujet semble ignorer.
 « Que celui qui compte économiquement et qui n’a jamais reçu un pot-de-vin lève son doigt… » disait Loïk le Floch-Prigent, ex Pgd de Elf Aquitaine (entreprise « faucille » publique française ayant pillé le pétrole africain) à l’occasion de la fameuse « affaire Elf » qui ébranlât les politiques français. Ce n’est peut-être pas un bon exemple, surtout en ce moment où l’intéressé est en délicatesse avec la justice togolaise pour une affaire d’escroquerie. Mais toujours est-il que Le pot-de-vin, loin d’être la norme, est toléré en affaire et des entreprises crédibles, pour ne pas dire vertueuses, y consacrent des lignes dans leur budget. L’essentiel, lorsqu’il n’y a pas de pépin, tout roule et chacun y trouve son compte.
Un projet rentable en difficulté
Si au finish, avec cette affaire de pot-de-vin qui éclabousse d’importantes personnalités au plus haut niveau de l’Etat, l’affaire montée par le groupe Hemos-Ciat capotait, le Bénin perdra un gros investissement. Plusieurs dizaines de milliards de francs Cfa qui devraient mobiliser des entreprises de Btp, des ouvriers de plusieurs secteurs, des transporteurs, du fret, les entités publiques concernées, etc. risquent de faire pif ! Sans oublier toutes les activités et tout le petit commerce qui se développe autour d’un tel chantier. Inutile d’évoquer ce que rapportera à terme un port sec à Tori. Nous osons croire que le Bénin n’en arrivera pas là et que des mesures idoines seront prises en vue de colmater les brèches pour sauver l’essentiel de l’affaire. Seulement voilà, en dehors du chef de l’Etat, le procureur de la République, garant de l’application de la loi portant lutte contre la corruption et autres infractions connexes en République du Bénin peut en décider autrement.
La répétition des affaires est nuisible
L’économie béninoise n’a pas intérêt à ce qu’on agite souvent et autour du chef de l’Etat, des affaires de pot-de-vin. Car, ceux qui les paient, sont des investisseurs ou tout au moins de potentiels investisseurs. Et à l’heure où nous parlons il y en a qui en donnent ou qui sont sur le point d’en donner. Autrement dit, blâmer pour une affaire de pot-de-vin, tout en étant moralement un acte salutaire, reste ridicule aux yeux de certains qui comptent beaucoup dans le monde des affaires, donc en économie. Ainsi, en faire un objet de campagne médiatique dans le sens de redorer son blason est à terme contre productif à notre sens. Car certains potentiels investisseurs, donc donateurs potentiels de pot-de-vin,  ont horreur des pays où ça se passe ainsi. Ce qui compte c’est comment faire en sorte que ceux qui prennent les pots-de-vin remplissent leurs engagements y relatifs en évitant le moindre pépin. Car, lorsqu’on sert l’Etat au plus haut niveau, il faut apprendre à défendre les intérêts publics qui passent par les siens propres. Pour les investisseurs, la responsabilité n’est pas moins grande. Car, au regard de la loi, le donneur de pot-de-vin qui tente de tuer le receveur, s’expose au même titre.
Le risque couru par Eric Hounguè et…
La loi n°2011-20 du 12 Octobre 2011, portant lutte contre la corruption et autres infractions connexes en République du Bénin dispose en son article 40 : «Est puni d’un emprisonnement de cinq (05) ans à dix ans et d’une amende égale au triple de la valeur des promesses agréées ou des choses reçues ou demandées, sans que ladite amende puisse être inférieure à un million de francs Cfa, tout agent public qui aura directement ou indirectement sollicité ou agréé des offres ou promesses ou reçu des dons ou présents ou autres avantages indus pour lui-même ou pour une autre personne ou entité, pour faire ou s’abstenir de faire un acte de ses fonctions ou de son emploi, juste ou non, mais non sujet à rémunération». Plus loin, la même loi stipule : «Outre l’amende, la peine est la réclusion criminelle à temps de dix (10) ans à vingt (20) ans lorsque la valeur des promesses agréées ou des choses reçues ou demandées est égale ou supérieure à dix millions (10.000.000) de francs Cfa et la réclusion criminelle à perpétuité lorsque cette valeur est égale ou supérieure à cent millions (100.000.000) de francs Cfa». Et tout ceci est applicable au corrupteur, donc à Monsieur Eric Hounguè. Par ailleurs, la loi dispose en son article 42 : «Lorsque l’infraction est commise par …, toute autorité administrative ou judiciaire nommée par décret ou arrêté quelle que soit sa qualité ou son statut,…, la peine encourue est de dix (10) ans à vingt (20) ans de réclusion et une amende égale au triple de la valeur des promesses agréées ou des choses reçues ou demandées, sans que ladite amende puisse être inférieure à cinq millions (5.000.000) de francs Cfa».
L’homme par qui le drame est arrivé
Le Pdg du groupe Hemos-Ciat, Eric Hounguè, promoteur du port sec de Tori est un Béninois ayant fait ses preuves à Abidjan en Côte d’Ivoire. La trentaine il a créé l’entreprise Hemos qui s’est associée à en partenariat avec  la Compagnie internationale de l’aménagement de terrains (Ciat) pour donner naissance au groupe Hemos-Ciat. C’est ce groupe qui réalise le port sec de Tori. Avec une apparence emprunte de simplicité et de naïveté, Eric Hounkpè ne ressemble pas, à première vue à une personne amoureuse des aventures ambigües. Pourtant, c’est par lui que le drame arrive. Suivant les versions les plus probantes, c’est à la suite d’une dénonciation suivie de preuve que les mis en causes ont été confondus. Malgré le niveau atteint par cette affaire et les conséquences infinies qui la suivent, Eric Houguè est confiant et croit toujours en son projet. Lors de sa dernière conférence de presse, tenue le lundi 17 septembre 2012 au Bénin Marina Hôtel, Eric Hounguè, après avoir dénoncé les comportements qu’il qualifie d’anti développement, s’est dit déterminer à œuvrer pour l’aboutissement du projet qui lui tient à cœur plus que tout.
Notons que pour avoir dénoncé des personnalités au plus haut niveau de l’Etat, le Directeur de cabinet du ministre chargé des infrastructures portuaires, Bio Sawé, le secrétaire général de la présidence de la République, Edouard Ouin Ouro et le directeur général du Port autonome de Cotonou, Joseph Ahanhanzo ont été relevés de leurs fonctions.  Aussi, d’autres personnalités de l’entourage du chef de l’Etat sont en disgrâce.
Ralf Zinsou

mardi 4 septembre 2012

Bénin-Emploi

70% de taux de chômage  ...
« Affirmer que le taux de chômage au Bénin avoisine les 70% n’est que justice ». C’est ce que soutient un chercheur qui a requis l’anonymat en cette période de méfiance généralisée. Une affirmation contraire à celle qui revient constamment aux lèvres des autorités béninoises de tout temps lorsqu’elles doivent aborder la question de l’emploi, environ 2%. En tant que médias, nous renvoyons ici scientifiques et gouvernants dos à dos pour analyser, sans préjugé, la question de l’emploi au Bénin.
Ralf Zinsou

En République du Bénin, un seul ministère est chargé de l’emploi, c’est le département chargé de la Microfinance, de l’Emploi des jeunes et des femmes. Celui en charge du Travail et de la Fonction publique s’occupe de ceux qui ont déjà un emploi, surtout ceux conventionnés. Ainsi, dans un pays où les demandeurs d’emploi sont de tous âges, la dénomination même du ministère en charge de l’emploi est discriminatoire. On parle spécifiquement de « l’emploi des jeunes et des femmes ». Heureusement que les femmes demandeuses d’emploi peuvent être de tous âges. Même si cette discrimination n’était pas de mise, les difficultés de l’emploi au Bénin sont réelles et lorsqu’on entend parler de 2% s’agissant du taux de chômage au Bénin, on n’a pas besoin d’être polytechnicien pour opposer un non catégorique.

Du discours officiel
Depuis 2006, les actions menées ont permis d’avoir des résultats subséquents au niveau des dispositifs d’appui à la création et la promotion de l’emploi. De 2.605 emplois en 2006, ces structures ont créé 402.861 emplois en 2008. Ils ont permis de créer l’essentiel des nouveaux emplois en 2008 et en 2009 comme le montrent les statistiques ci-dessous. Toute chose qui témoigne de l’efficacité des dispositifs d’appui à la création et à la promotion de l’emploi, en particulier depuis 2007.
Toujours en ce qui concerne le discours officiel, on reconnaît que les bons résultats enregistrés par la politique de l’emploi au Bénin entre 2006 et 2009 n’ont pas suffi pour réduire les tensions qui s’observent sur le marché du travail. Ce qui serait justifié par la poussée démographique et des nouveaux diplômés qui sortent des centres de formation. Ainsi, l’écart entre l’offre et la demande d’emploi s’agrandit d’année en année comme en témoigne le graphique ci-dessous.
En conséquence, la situation de l’emploi ne s’est pas améliorée depuis 2002. Le taux de chômage est resté constant depuis lors dans un contexte où la population du pays ainsi que le taux d’activité globale s’accroissent. Il s’en suit que le nombre de chômeurs est en augmentation. Il faut également souligner que plusieurs diplômés sont amenés à s’occuper, d’une façon ou d’une autre, faute d’un emploi lié à leur formation. Le taux de sous-emploi estimé lors de l’enquête modulaire intégré sur les conditions de vie des ménages (Emicvm 2007) est de 70%.
Enfin reconnaît-on officiellement les 70%...
70% de taux de sous emploi. Pourquoi ne pas prendre en compte ce taux, pour le taux de chômage juvénile si l’on s’entend qu’il prend en compte les jeunes demandeurs d’emploi qui s’occupent vaille que vaille en attendant un emploi à de leur convenance, à la hauteur de leur qualification professionnelle ou tout au moins leur niveau académique ? Toute la question est là lorsqu’on sait que les 2% cités plus haut éliminent tous ceux qui aident une personne de leur entourage et qui reçoivent une rétribution inconséquente. Inutile d’évoquer les diplômés contraints de conduire un taxi-moto pour subvenir à tout ou partie de ses besoins vitaux. Ainsi, ne serait-il pas plutôt conséquent d’ajouter aux 2% toutes ces personnes sous employées ? A notre sens, lorsqu’on ajoute cette frange de population active aux 2% on obtiendrait tout simplement les 70% ou tout au moins un chiffre très proche de cette valeur. Et à partir de ce courage politique, les Béninois, les jeunes en l’occurrence, se retrouveront aisément dans les statistiques officielles de l’emploi au Bénin. La non dissimulation des faiblesses est un véritable levier de développement nous enseigne la sagesse. Et nous croyons que cette sagesse vaut pour le Bénin de tout temps et mieux encore celui d’aujourd’hui. C’est lorsqu’on accepte de reconnaître la profondeur de sa plaie que l’on se dote de moyens efficaces pour la soigner. Aujourd’hui, le Bénin, avec les cris de cœur qui montent a besoin d’une politique de l’emploi effectivement applicable avec peu de place pour les improvisations.

Perspectives de politique                          de l’emploi       
Lorsqu’on se projette dans l’avenir au Bénin, on note qu’il existe un document de politique nationale de l’emploi ainsi qu’un plan d’actions 2010-2014. Ce document s’inspire des documents de stratégie internationale comme « La Déclaration du millénaire des Nations Unies : un pacte social pour la création d'emplois », « Le Pacte mondial pour l’emploi », « La Déclaration du sommet de l'Union africaine sur l'emploi : la création d'emplois productifs décents, priorité des chefs d'Etat » et des documents de stratégies nationales. Ils ont peut-être le mérite d’être convainquants. Mais il y a mieux que le mérite d’un document pour faire bouger les lignes dans la société. Au-delà des documents stratégiques en effet, il y a le besoin de disposer d’hommes et de femmes volontaires et convaincus pour accomplir de grandes tâches que retient généralement l’histoire.


lundi 3 septembre 2012

Bénin-Gouvernance

Yayi s’éloigne de son programme
SEM. Boni Yayi, président de la République du Bénin
Avec la situation économique actuelle du Bénin, et les options de réformes faites dans maints secteurs, nombreux sont ceux qui s’interrogent sur le virage que prend le Bénin et sur la base de quel référentiel. Nous prenons ici l’initiative de questionner les grands traits du programme économique du candidat Boni Yayi afin de savoir si cette plate forme de bonnes intentions peut aujourd’hui être considérée comme le référentiel de l’action gouvernementale sur le plan économique.
Ralf Zinsou



A l’épreuve des faits, et depuis avril 2011, la marge est grande entre ce que le candidat Boni Yayi a promis aux électeurs sur le plan économique et ce qui relève aujourd’hui du lot quotidien des Béninois.

Affaire Icc et consorts
Sur le plan économique au Bénin, l’un des faits qui ont sérieusement perturbé les agents économiques au cours du dernier quinquennat du président Boni Yayi est l’affaire dite « Icc service et consorts ». A ce propos et à la veille de la présidentielle de 2011, le candidat Boni Yayi a promis s’impliquer personnellement, ce qui était déjà le cas, dans le processus de remboursement des spoliées. Ce fut un engagement solennel au grand meeting du candidat tenu au stade de l’amitié à Cotonou. Les électeurs, malgré le maigre résultat obtenu par le dispositif déjà mis en place par les soins du même candidat pour recouvrer lesdits fonds, ont cru que l’impossible était possible. Mais depuis plusieurs mois, beaucoup de communiqués et des débuts d’initiatives sans grand résultat. Peut-être que les jours à venir nous démentiraient. Vivement le démenti.

Faire du Bénin un véritable pôle de transport/logistique
Au point d’orgue du programme économique du candidat Boni Yayi, il y a la volonté clairement affichée, avec des actes déjà amorcés lors du premier quinquennat, de faire du Bénin un hub régional de services à valeur ajoutée. Pays de transit, avec un port qui venait de bénéficier d’importants investissements dans le cadre du premier compact du Millénium challenge accunt, le candidat Boni Yayi avait pris de sérieuses options pour faire du Bénin un véritable marché régional de biens et services. Une pate-forme de services logistiques d’exportation dans la perspective d’un centre régional de négoce et de services à valeur ajoutée était l’ambition clairement affichée par l’actuel président de la République. Aujourd’hui, ce rêve promis aux Béninois est loin de la réalité. En effet, après l’introduction, suivie immédiatement du retrait, du Programme de vérification des importations (Pvi) de nouvelle génération, le port de Cotonou, ayant vu ses capacités renforcées, se trouve dans une situation de ralentissement de trafic pendant que les autres ports de la sous-région connaissent un accroissement d’activités. Il y a quelques jours, une personnalité politique, évoquant la situation politique au Togo, indiquait qu’il souhaiterait que cette nouvelle donne de l’instabilité à Lomé relance les activités au Port de Cotonou. Il n’est pas cynique mais préoccupé par le sort de son pays. Car, annuellement et situation convenable, le port apporterait plus que le coton en termes de croissance économique au Bénin.
Pour faire du Bénin un véritable pôle de transport/logistique il importe de développer le réseau routier, ferroviaire et construire d’autres aéroports et ports qu’ils soient en eau profonde ou en terre ferme. Au cours du quinquennat en cours, à la différence du dernier, le rythme de construction des routes est réduit. Et même certains chantiers lancés à la veille de la présidentielle piétinent. Même la route la plus rentable, étant donné la position stratégique de Cotonou pour les pays de l’Hinterland, Cotonou-Malanville, souffre d’un état de dégradation avancée à plusieurs endroits. Des chantiers de port sec sont lancés et les Béninois en attendent beaucoup avec un goût d’inachevé lorsqu’ils pensent aux ports secs déjà inaugurés mais pas véritablement en service. Les travaux des aéroports de Tourou et de Glodjigbé lancés avancent au rythme de l’économie nationale. Quant au chemin de fer, statu-quo. Le réseau actuel est inférieur à celui laissé par le colonisateur et aucune lueur d’espoir en perspective.

Le coton en situation délicate
Alors qu’en 2011, le candidat Boni Yayi promettait, non seulement, de relancer la filière coton mais de développer d’autres filières à l’image de celle du coton, c’est la filière coton elle-même qui souffre d’improvisation doublée de remise en cause permanente aujourd’hui. Le ministre chargé de l’agriculture est très optimiste pour la campagne en cours et nous souhaitons qu’il ait raison pour ce que représente la filière coton pour l’économie béninoise. Selon les informations du ministère de l’agriculture, 50.000 tonnes de coton graine apporterait à l’économie béninoise 1% de taux de croissance.

Quartier numérique de l’Afrique ?
Avant la fin du premier quinquennat de Boni Yayi, le ministre chargé de la communication promettait aux Béninois de faire du Bénin le quartier numérique de l’Afrique. Une ambition louable reprise par le candidat Boni Yayi en 2011. Seulement, à l’épreuve des faits, sur le plan numérique, le Bénin a des leçons à recevoir des pays enclavés sans littoral où atterrissent souvent les terminaux des réseaux à fibres optiques. Il s’agit là d’un constat que font chaque jour tous les Béninois qui ont le privilège de se connecter à l’internet.

Le tourisme en panne
Le secteur touristique a un potentiel de croissance reconnu par l’actuel régime. Le candidat Boni Yayi y a mis un accent particulier en 2011. Inutile de mettre quoi que ce soit à l’actif du régime dans ce registre aujourd’hui en dehors du lancement d’un chantier routier dans le cadre du projet « Route des pêches ». Ceci est facilement compréhensible étant donné que les fondamentaux de l’économie sont en souffrance et qu’ici on prend le tourisme comme une activité économique secondaire.

Le pétrole
A plusieurs reprises, le candidat Boni Yayi a promis aux électeurs de faire en sorte que le Béninois goûte enfin aux délices miniers en mettant la recherche et l’exploitation du pétrole au centre de ses préoccupations. Dans ce domaine, en dehors de quelques investisseurs potentiels reçus par le chef de l’Etat qui promettent le pétrole pour bientôt, les Béninois devront attendre encore longtemps.
Au demeurant, les actes posés depuis le 2011 à la suite de l’élection présidentielle sur le plan économique ne sont pas encore à la hauteur des promesses du candidat Boni Yayi. Nous n’avons pas la prétention d’avoir été exhaustif. Mais il n’est pas contre productif d’espérer le meilleur en pensant aujourd’hui que l’heure est à la pause des balises en attendant le mieux, vivement attendu par les nombreux ménages qui subissent sérieusement la crise économique actuelle.